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Le Festival culturel panafricain d'Alger renaîtra-il de ses cendres ?
Le Festival culturel panafricain d'Alger renaîtra-il de ses cendres ?

Par : Fériel Berraies Guigny. Le Temps. 06.02.2009

Le Panafricanisme fait son grand retour, ces derniers mois, thématique à la mode grâce à deux événements culturels panafricains qui semblent vouloir renaître de leurs cendres : le 2e Festival culturel panafricain d'Alger et le Festival international des Arts nègres qui se dérouleront au Sénégal. Deux évènements historiques en devenir, d'un symbolisme capital.

Car il faut rappeler, que l'élan panafricaniste a connu sa traversée du désert, à l'instar de celui des années 70 qui avait insufflé un souffle incroyable à un projet qui devait réunir tous les peuples d'Afrique. Ce projet d'une société idéale africaine, devait s'inscrire dans la continuité et ainsi, résorber les écarts entre les pays d'un même Continent

Le Panafricanisme victime de l'Histoire
L'Histoire a décidé pour ce mouvement, car les peuples d'Afrique se sont affrontés, confrontés entretenant une dialectique de méfiance et de défiance. Les préjugés hérités du Nord ont beaucoup aidé et l'élan Sud Sud a dès lors été sacrifié. L'histoire des peuples d'Afrique est ancienne, elle remonte aux premiers contacts transsahariens établis entre le VIIIe et le Xe siècle de notre ère, sous le prisme des civilisations Berbères (Khârijites, Almoravides) et des échanges commerciaux mais également culturels (linguistiques, religieux, etc.)

La conquête, la domination et l'esclavage en terre d'islam ont mis à mal, cette proximité géographique et les blessures sont encore présentes dans l'inconscient collection

40 ans presque ont aussi passé, depuis le premier Festival culturel panafricain d'Alger. Date symbolique qui avait bercé le pâle espoir de l'échange et de la tolérance envers les diversités africaines plurielles. Le Festival des Arts nègres de 1966 n'a quant à lui pas été renouvelé. Les années post 70 n'ont pas pu assurer la continuité, et les initiatives culturelles sporadiques de part et d'autres du Continent n'ont pas fait le poids. Faillite identitaire africaine ou essoufflement d'une idéologie ?

Alors que l'économique a tracé sa route, le culturel devenu moribond, a creusé les écarts entre les trois pays du Maghreb qui ont alors changé leur politique africaine. La Tunisie, l'Algérie et le Maroc ont donc entretenu des rapports différents avec l'Afrique subsaharienne. Selon A. Kessab, chercheur algérien, spécialisé dans la politique culturelle algérienne, Alger n'a jamais renoncé à son identité africaine, elle l'aurait juste mise entre parenthèse. Au sortir de la décolonisation, elle était devenue un modèle de résistance, elle découvrait à la même époque, sortie du joug français, son appartenance africaine. Mais elle ne se reconnaissait pas pour autant, dans un mouvement de négritude qui entretenait tacitement une certaine connivence avec l'ancienne puissance coloniale. Sous le patronage du général de Gaulle, le premier Festival mondial des arts nègres de Dakar était considéré par le pays Çd'un million et demi de martyrs È comme une insulte à l'ensemble des peuples qui ont souffert du colonialisme.

Il faut se rappeler, qu'à l'époque des premiers mouvements africains de résistances armés et intellectuels, le fossé idéologique et culturel séparant une grande partie de l'Afrique noire de l'Algérie existait déjà. Pour Kessab, la définition même de la résistance à la colonisation était différente pour les deux bords. Léopold Sédar Senghor, et sa définition de la Ç négritude È et d'africanité, faisait plus référence à l'Homme de couleur noire, excluant ainsi peut être involontairement ou consciemment, les voisins du Maghreb.

Un combat intellectuel

Pour Senghor, le combat était plus intellectuel qu'armé, alors que l'Algérie plongée dans son élan nationaliste Arabe mélangé au communisme et à l'Islam revendiquait davantage la lutte armée. Par ailleurs, aucun des trois textes fondateurs de la République Algérienne rédigés avant 1962 ne faisait allusion à l'appartenance africaine.

Le sentiment d'appartenance au continent africain n'est venu qu'à l'indépendance. L'Algérie libérée, revendiquera peu à peu son identité africaine en la constitutionalisant en 1963. Pour Kessab, il est important de corriger certaines mauvaises interprétations historiques s'agissant du peuple algérien. Les Algériens qui, rappelons le, ont subit une tentative d'acculturation de 132 ans, restaient frileux par rapport à toute nouvelle identité.

L'heure des décolonisations des pays d'Afrique, signera les premiers contacts et une meilleure connaissance de l'autre. La résistance, devenait une valeur commune, l'union et la solidarité entre les peuples africains également.

Toutefois, certains divergences restaient dans le discours. Le mouvement de la " négritude " était soutenu par la France, et organisait son premier Festival mondial des arts nègres à Dakar en 1966. Son thème "Fonction et importance de l'art nègre et Africain pour les peuples et dans la vie des peuples" allait créer la dichotomie noir blanc. Cette manifestation allait certes inscrire la négritude dans les courants culturels mondiaux, mais qu'en était-il pour les peuples d'Afrique non issus de la négritude.

Le Maroc et la Tunisie furent avec les Emirats Arabes Unis les seuls pays Arabes participants au festival.

Le Maroc, en conflit sur les frontières avec l'Algérie, soutiendra l'événement par opposition à son frère ennemi. Seuls les intellectuels marocains, en majorité de tendance communiste furent farouchement hostiles au festival de Dakar. Les contemporains de l'événement se rappellent bien de la diatribe du journaliste Abdallah Stouky parue dans la revue Souffle en 1966, une revue interdite quelques années plus tard et dont le fondateur sera jeté en prison par feu le Roi Hassan II.

La Tunisie avec Habib Bourguiba, soutiendra Senghor dans son projet de francophonie internationale.

Mais pour beaucoup de contemporains, la complicité entre les deux hommes cachait en réalité un rapport d'intérêt. De source populaire, l'ancien président sénégalais aurait dit que son homologue tunisien était foncièrement raciste.

L'Algérie fut donc la grande absente au festival de Dakar. Seule la chanteuse Taous Amrouche qui résidait à Tunis à l'époque, avait représenté son pays. Une présence qui lui valut de recevoir le prix de la musicologie, mais également d'être interdite au Festival panafricain d'Alger en 1969.

En Afrique Subsaharienne, le boycott viendra de la Guinée de Ahmed Sékou Touré. Sur le plan international, de Cuba avec Fidel Castro. Les deux pays communistes, manifestaient ainsi, leur solidarité avec le parti d'extrême gauche sénégalais PAI (Parti Africain d'Indépendance), interdit et ses partisans malmenés à l'époque, par Senghor.

Des voix s'élèveront à l'intérieur même du Sénégal avec l'Union générale des étudiants de l'Afrique occidentale (UGEAO) et ceux de l'Union générale des étudiants sénégalais (UGES) qui appelleront au boycott.

Premier Festival panafricain à Alger Pourquoi le premier Festival Culturel panafricaniste d'Alger ?

Alger a décidé de dépoussiérer à l'époque ce mouvement en lui concevant un festival sur mesure : le premier Festival culturel panafricain d'Alger. Appelé aussi " opéra du tiers-monde" organisé en 1969, sous la thématique de "Réalités de la culture Africaine et rôle de la culture Africaine dans la libération nationale, dans la consolidation de l'unité Africaine et dans le développement économique et social de l'Afrique". Tout un vaste programme, presque trop ambitieux. Une réponse peut être au sentiment d'exclusion ressenti par rapport au 1er FESMAN. L'Algérie des années 70, voulait démontrer que l'indigène pouvait gérer son propre destin et défier l'ancien colonisateur. Avec pour objectif de regrouper les " Afriques ", au delà des diversités et des couleurs de peau, le panafricanisme devenait une idéologie unificatrice et même un prétexte. L'Algérie voulait attirer l'attention sur elle et asseoir son leadership sur les pays tiers-mondistes.

Les réfractaires au FESMAN, affluèrent de partout sur Alger pour assister au 1er Festival culturel panafricain d'Alger, manifestant leur opposition à l'idée de la négritude. Henri Lopes, Stanislas Adotévi, Wole Soyinka, Almicar Cabral, René Depestre et tant d'autres feront de cette occasion, une tribune pour régler leur compte avec Senghor. A Dakar même, la conférence de Pathé Diagne intitulée Ç La négritude dans le Festival Panafricain d'Alger È au lendemain du festival, déconstruisait sans grande indulgence, le concept de négritude.

Le 2e Festival culturel panafricain d'Alger : bilan du passé et perspectives à venir
Aujourd'hui, le Festival Panafricain continue d'être une référence en matière de politique culturelle en Algérie. L'idée a survécu au passage du temps et aux nouvelles générations.

Mais la confrontation idéologique entre les tenants de la "négritude " venant du Sud et les partisans du "panafricanisme " du Nord et du Sud, conduit encore à l'impasse.

La plupart des pays d'Afrique noire perçoivent le continent comme " noir ", et pour les pays du Maghreb la référence à la seule négritude s'agissant de l'Afrique est inenvisageable.

L'Europe, à travers ses programmes d'assistance destinés à l'Afrique, accentue par
ailleurs, les disparités entre l'Afrique blanche et l'Afrique noire.

La décision du gouvernement algérien d'organiser en juillet 2009 le deuxième Festival culturel panafricain d'Alger, parviendra t-il à faire évoluer les mentalités ?

Une annonce il faut le rappeler, qui vient à quelques mois de l'annonce du Président Abdoulaye Wade quant à la tenue à Dakar de la troisième édition du Festival mondial des arts nègres.

Quatre mois d'intervalle entre la tenue de ces deux festivals en 2009. Quelle déduction apporter ?

Pour M. Kessab, l'Algérie qui ne fait toujours pas partie de la Francophonie, veut simplement faire "son propre festival " ou contre festival.

Le président Wade quant à lui, opposé à Senghor de son vivant, a vidé le Festival Mondial des Arts Nègres 2009 de sa " négritude " pour en faire une "Renaissance de l'Afrique "

Mais comme pour les éditions précédentes, le festival demeurera sous l'auspice de la France avec, Ç l'ennemi frère È de toujours, le Maroc, qui s'occupera tant de son orientation que de son organisation.

Alors où sont passés les adeptes des vieilles idéologies africaines ?

Les panafricanistes convaincus par la force des choses se sont convertis en théoriciens au bord des facultés européennes et américaines.

Le conflit idéologique qui opposait le mouvement de la négritude au mouvement du panafricanisme n'a plus raison d'être devant les intérêts géostratégiques actuels. Le conflit avec le Maroc d'un côté, et la francophonie de l'autre suffisent à calmer toutes les velléités de panafricanisme pure et dure.

Depuis les échanges culturels Sud Sud subissent un net recul. Quelques festivals Ç africains È ici et là, prolixes au Maroc, très rares en Algérie, et quasi inexistants en Tunisie. En Afrique Subsaharienne, le FESMAN, la FESPACO ou encore le FESPAD continuent mais sans grande conviction.

Pourtant les discours officiels revendiquant l'identité africaine ne manquent pas au Maghreb, mais cela reste de la rhétorique tant que l'Afrique subsaharienne ne sera pas pleinement convaincue que leurs Ç frères blancs È au Nord sont aussi africains à part entière.

Pour l'heure, l'Algérie s'active et a lancé diverses initiatives venant accompagner la prochaine tenue du 2e Festival Culturel Panafricain d'Alger : la tenue à Alger en octobre 2008 de la deuxième session de la Conférence des Ministres en Charge de la Culture de l'Union Africaine ; la construction du grand Musée africain, la fondation de l'Institut culturel panafricain, le 2e Colloque international sur les littératures africaines à Djanet ou encore, le Festival international de la Bande dessinée, qui compte près de 30 pays d'Afrique Subsaharienne. Et enfin, le lancement éditorial de la première revue Africaine du livre.
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