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Première tranche du budget pour la conservation de la vieille ville |
Plus de 120 millions de dinars pour restaurer la médina de Tlemcen
Par : Mohamed Medjahdi. La Tribune. 19/02/2008
Des démarches sont en cours pour le classement de la vieille ville comme site. La médina devrait bénéficier d’un plan permanent de sauvegarde et de mise en valeur, dont le dossier vient d’être soumis à la Commission nationale des biens culturels
Plus de 120 millions de dinars seront affectés aux différentes opérations visant la restauration de la médina de Tlemcen, a-t-on appris auprès du directeur de la culture de la wilaya de Tlemcen. Ce montant n’est en fait qu’une première tranche pour protéger la vieille ville, a-t-il ajouté. Brahim Chenoufi, archéologue et conservateur du patrimoine à la direction de la culture de Tlemcen, indique par ailleurs que la medina, qui s’étend sur 844 747 m2, «est ce qui reste de l’ancienne capitale du royaume des banous Abdeloued de la dynastie des Zianides [du XIIIe au XVIe siècles]». Mais la vieille ville s’est en fait constituée depuis l’époque des Almoravides. «Une fois l’imprenable Agadir investi, ils fondèrent Tagrart [camp militaire en zénète] en lançant le chantier de la grande mosquée», dira l’archéologue, ajoutant que «depuis, Tlemcen ne cessa de s’embellir et de se doter de joyaux, particulièrement sous les Zianides, médersas, hammams, foundouqs, centres commerciaux, bassins, palais, jardins, etc.». C’est ainsi que Tlemcen vécut des périodes fastes et de jours de gloire et contribua, en dépit du déclin de la civilisation arabo-mauresque dans l’Occident, à l’effort civilisateur sur le plan du savoir et de la création artistique. Mais, la cité connaîtra des jours sombres et difficiles : sièges, invasions répétées, particulièrement dès la fin du XVe siècle qui fut l’époque de la Reconquista espagnole et l’avènement des turcs pour défendre cette contrée menacée, et qui durent détrôner à jamais la dynastie zianide chancelante. Tlemcen subit ainsi de plein fouet les conséquences d’une époque très mouvementée et instable.
«C’est à ce moment-là que son tissu s’est rétréci comme une peau de chagrin. Son bâti s’est lamentablement dégradé, la ville se dépeupla peu à peu et de nombreuses familles l’abandonnèrent pour des cieux plus cléments, pour d’autres contrées proches ou lointaines. Le commerce comme les métiers déclinèrent mais se maintinrent. La colonisation française apporta de profondes modifications au tissu urbain traditionnel», note l’archéologue. «Une nouvelle trame, européenne, fut greffée sur la première. Tlemcen perdit de ce fait de nombreux monuments des plus prestigieux à l’image de la Médersa tachfiniya située dans la partie est de l’actuelle place publique. Cette prestigieuse médersa où professèrent des savants illustres fut rasée par les Français et quelques fragments de ses boiseries et de ses panneaux de zellidj se trouvent au musée de Tlemcen, aux Antiquités d’Alger et au musée de France […]. Toutefois, et si les études sur la tachfiniya sont à encourager afin de mieux comprendre son état initial dans tous ses détails, il serait vain de vouloir la restituer, sauf virtuellement. La restitution sur son emplacement d’origine est à écarter, parce qu’une nouvelle tachfiniya ne sera qu’une nouvelle construction moderne et jamais un monument historique. Construire sur les ruines de la medersa originelle amènerait à détruire le sol où hibernent ses restes archéologiques. Nous avions en 1994 mis au jour et vérifié l’existence des substructions (bordures de pavage en marbre et zellidj). Ce fut lors de la rénovation du réseau d’AEP», ajoutera notre interlocuteur. Revoir les Chartes d’Athènes (1932), de Venise (1964), de Burra, de Nara, etc. sur les principes de la restauration fera sans doute changer d’avis à beaucoup d’adeptes d’idées farfelues comme celle qui défend la reconstruction de la médersa dans l’enceinte de la citadelle du Mechouar ! Car, précise-t-il, «la restauration est une opération qui doit garder un caractère exceptionnel», lit-on dans l’article 9 de la Charte de Venise. En outre, «elle a pour but de conserver et de révéler les valeurs esthétiques et historiques du monument en se basant sur le respect de la substance ancienne et des documents authentiques. Elle s’arrête là où commence l’hypothèse». La restitution, sauf dans des cas bien précis (reconstitution de jardins archéologiques, détails d’ornement, éléments architectoniques en vue d’une meilleure lecture de l’œuvre…), est un concept banni en matière de restauration et a fortiori lorsqu’il s’agit de reconstruire sur des ruines existantes. M. Chenoufi a, cependant, déclaré que la médina de Tlemcen a perdu de son lustre et tombe en ruine. Toutefois, les démarches sont en cours pour son classement en tant que site. Cette opération s’inscrit dans le cadre de la politique de conservation et de valorisation de cette médina, que mène la direction de la culture de Tlemcen et qui, à terme, devrait doter ce noyau originel de Tlemcen d’un plan permanent de sauvegarde et de mise en valeur, dont le dossier vient d’être soumis à la Commission nationale des biens culturels. En attendant, 120 millions de dinars ont été alloués pour les travaux de restauration d’urgence, mais surtout de valorisation de la médina. Ils viseront très probablement l’harmonisation des façades par des ravalements appropriés, le pavage des derbs (venelles) et placettes, quelques réparations ou consolidations nécessaires et la révision du système d’éclairage public en l’adaptant à la spécificité du site.
M. M. |
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